Si Philippe Soirat a sa place dans ma discothèque, celle-ci reste discrète. Sideman des plus grands comme le regretté Barney Wilen, le pianiste Barry Harris ou le vétéran Lee Konitz, aujourd'hui, il entre dans la lumière avec ce premier album sous son nom.
Pour cet enregistrement, Philippe Soirat revisite un répertoire de premier choix. Son quartet impressionne par sa justesse dans l'évocation de ces pépites du jazz moderne. Les plus belles signatures sont au rendez vous et, avec elles, le génie des compositeurs les plus marquants de ces dernières décennies.
1965, souvenez vous du Maiden Voyage d'un jeune pianiste nommé Herbie Hancock. Ce dernier va bientôt écrire la bande originale d'une Palme d'Or à Cannes avec Blow Up d'Antonioni. C'est la consécration de ce grand musicien. Ici, on ouvre le bal avec le magnifique Eye Of The Hurricance. L'interprétation donne le ton du disque : puissance et retenue.
Rien ne manque au menu du groupe. Il produit un jazz riche en maturité où l'émotion, l'énergie et une virtuosité maîtrisée ne cessent de nous surprendre. Chez Soirat : on doit répéter sans brider la spontanéité.
Tout au long des plages, on retrouve Wayne Shorter et le beau Valse Triste. On s'incline devant le Monk "Underground" d' Ugly Beauty. Même Gillespie rejoint le lot avec Woody'n You. Aucune faute de goût, aucun racolage ...
David Prez, au ténor, rappelle autant George Coleman que le sous estimé Joe Henderson (Black Narcissus). Vincent Bourgeyx reste lui-même dans tous les registres abordés. Yoni Zelnik, à la contrebasse, brille d'un son rond et soutenu. Enfin, notre leader développe ses idées sans dominer, évitant ainsi de faire du simili Tony Williams ou du Ben Riley de seconde main. Il a travaillé soigneusement le son, la frappe et les solos sont efficaces.
Il faut souhaiter que cette union ne soit pas celle d'un jour et que ces hommes poursuivent la tradition en plaçant ce répertoire à la hauteur des grands standards de cet art majeur que reste le Jazz.